LE SIECLE DES LUMIERES

 

La confiance en l'homme, la curiosité d'esprit, la tolérance vont se manifester au cours du XVIII° siècle qui va connaître une révolution scientifique et technique. Un nouveau système de mesures apparaît. C'est le siècle de l'Encyclopédie avec Diderot et d'Alembert. C'est celui de Réaumur, Volta, Galvani, Fahrenheit, Franklin, Watt, Coulomb. C'est aussi celui des frères Montgolfier, de l'apothicaire volant, inventeur du premier masque à gaz, Pilatre de Rosier. Buffon et Lacépède sont les auteurs d'Histoires Naturelles réputées.

La botanique devient une science

La botanique va devenir une véritable science avec Linné qui, pour chaque espèce de plante, donnera un double nom latin, le premier pour le genre, le second précisant l'identité.

C'est l'époque des flibustiers, des corsaires, mais aussi des grandes explorations, de Bougainville avec  la Boudeuse, de La Pérouse avec la Boussole et l'Astrolabe. Buffon, nommé en 1739 intendant du Jardin du Roi par Louis XV, donne une impulsion  aux expéditions scientifiques. La Condamine dirige l'une d'elles, confirme les hypothèses de Newton, découvre la résine qui provient d'un arbre appelé "Cahuchu", le caoutchouc, le curare. Joseph de Jussieu, qui en fait partie, découvre et fait parvenir l'arbre à Quinquina, l'ipécacuanha, le Coca. Antoine de Jussieu et le chevalier  Declieux participent à l'implantation du café aux Antilles. Pierre Poivre, après avoir découvert à Batavia, les arbres à épices, revient à Paris et expose à  Louis XV et Buffon son projet: créer à l'île Maurice et à l'île de la Réunion une annexe du Jardin du Roi consacrée aux plantes exotiques, le Jardin des Pamplemousses. Louis XVI, partisan lui aussi des expéditions scientifiques, décide d'une exploration dont il confie la direction à La Pérouse qui part de Brest le 1er août 1785 avec l'Astrolabe et la Boussole. En 1788, c'est le naufrage. La botanique française est reconnue en Amérique. Après la proclamation de l'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique, le botaniste André Michaux introduit en Amérique les plantes européennes et lui révèle ses propres richesses avant de les introduire sur le Vieux Continent. Ce dernier découvre à son tour les ressources curatives de l'Amérique: le Polygala pour les maladies bronchiques, le rhizome de Podophylle, purgatif, le Cascara, purgatif, le Gelsemium sempervirens contre les névralgies, la Lobélie, stimulant respiratoire, l'Hamamélis, veinotonique.

Antoine-Augustin Parmentier, apothicaire militaire, suit les cours des scientifiques les plus éminents, l'Abbé Nollet pour la physique, les frères Rouelle pour la chimie,  Bernard de Jussieu pour la botanique et devient en 1766, pharmacien des Invalides où dans son laboratoire, il entreprend des recherches en particulier sur l'alimentation (amélioration de la qualité du pain, conservation des viandes par le froid, substitution du sucre de canne par le sucre de raisin). Il écrit de nombreux ouvrages sur l'hygiène, la pharmacie, l'agriculture. Il publie ainsi,  le Code pharmaceutique à l'usage des hospices civils, des secours à domicile et des infirmeries des maisons d'arrêt, l'Examen chymique des pommes de terre dans lequel il plaide en leur faveur, tout en précisant qu'il n'en est pas l'inventeur.

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A.A. Parmentier

La deuxième révolution de la chimie

De simples amateurs, parfois, des médecins, des pharmaciens souvent incompris de leurs contemporains réalisent des expérimentations chimiques qui vont aboutir à la découverte de la molécule et à la création de nouvelles substances.

Black, Priestley et Cavendish découvrent la "chimie pneumatique"

Black traite le carbonate de calcium (marbre) par l'acide chorhydrique et obtient de la chaux qui représente 75 % du poids du calcaire traité. Selon Black, la diminution de poids est due au départ de gaz carbonique. Il réfute ainsi la théorie aristotélicienne de l'indivisibilité de la matière en formant à partir d'une molécule, le carbonate de calcium, deux molécules, la chaux et le gaz carbonique. Quelque temps après, le pasteur Priestley découvre s'autres gaz tels que le gaz ammoniac et met au point une technique permettant à l'eau de capter le gaz carbonique. L'eau gazeuse ainsi obtenue est l'eau pétillante de Priestley qui, plus tard, deviendra l'eau de Seltz. Cavendish en traitant des métaux par un acide, isole l'hydrogène. En combinant ce gaz avec l'oxygène et en faisant jaillir une étincelle, il obtient une explosion et quelques gouttes d'eau. A partir de deux gaz est ainsi synthétisé de l'eau. Dalton, en s'inspirant de l'hypothèse de Démocrite et des résultats expérimentaux de Black, Priestley et Cavendish, énonce la théorie des atomes  et des molécules : "Les particules ultimes de tous les corps simples sont les atomes, qui ne se prêtent pas à une division plus poussée...".

Lavoisier découvre un monde nouveau : la chimie organique

Contrairement au monde minéral qui est entrevu, la substance organique demeure mystérieuse jusqu'aux travaux de Lavoisier qui démontre le rôle de l'oxygène dans la combustion des matières organiques et découvre que celles-ci dégagent du gaz carbonique et de l'eau, donc contiennent du carbone et de l'hydrogène. Il découvre la composition de l'air et celle de l'eau et la nature de la respiration : " Nous dirons que la respiration n'est qu'une combustion lente de carbone et d'hydrogène qui est semblable à celle qui s'opère dans une bougie..."

Lavoisier est également un administrateur prévoyant et généreux. Il améliore l'état sanitaire des prisons et hôpitaux. Perfectionnant l'oeuvre de Renaudot au siècle précédent, il met en place "une caisse d'assurance contre les atteintes de la misère et de la pauvreté". 

Sa générosité, son génie n'empêchent pas son jugement, en tant que fermier général, par le tribunal révolutionnaire et sa condamnation à mort. "La république n'a pas besoin de savant." a-t-on pu dire. Le meilleur éloge sera celui de Lagrange : "Il ne leur a fallu qu'un moment pour faire tomber cette tête, et cent années peut-être ne suffiront pas pour en reproduire une semblable."

En chimie organique, l'étape suivante sera en 1828 la synthèse de l'urée à partir de deux composés inorganiques ( le cyanate d'argent et le chlorure d'ammonium) par un disciple de Berzélius, F. Wöhler.

Gay-Lussac découvre l'identité de formule brute entre deux corps que Berzélius dénomme isomères. 

Les prémisses de l'industrie pharmaceutique

A la fin du XVIII° siècle, la chimie passe au stade industriel. En 1775, l'Académie des Sciences offrant une récompense au chercheur qui propose un moyen économique de production de carbonate de sodium (nécessaire à la fabrication de savon, du verre et du papier), N Leblanc propose un procédé. Celui-ci n'étant pas retenu. Leblanc  fonde, en 1791, une usine qui devient vite rentable. L'entreprise est confisquée par le gouvernement révolutionnaire en 1794 et restituée par Napoléon en 1801. Mais Leblanc, découragé, se suicide cinq ans plus tard.

Le 29 décembre 1788, dans le Journal de Paris, paraît l'annonce de la fabrication de l'eau de Javel à la "Manufacture de Monseigneur Comte d'Artois, pour les acides et sels minéraux". Aussitôt après, Berthollet, dans les Annales de Chimie (1789), revendique l'invention de cette préparation ou "liqueur de javelle".

A. Baumé (1728-1804), maître-apothicaire, démonstrateur en "chymie" à Paris publie divers ouvrages dont "Le Manuel de Chymie" et les "Elemens de Pharmacie théorique et pratique". Il insiste sur l'importance de la "Pharmacie chymique" en l'opposant à la "Pharmacie galénique".  

Les premières réglementations pharmaceutiques

Les remèdes secrets préparés par des apothicaires ou des empiriques qui désiraient garder le secret ainsi que par des charlatans persistent quelque temps, malgré les ordonnances de Louis XV et Louis XVI qui les interdisent ou du moins les réglementent. Les spécialités vont être codifiées. En 1810, tout remède, ancien ou nouveau, n'est autorisé que s'il est acheté par l'Etat sur présentation d'une commission.

Examen de pharmacie (Coll. Faculté de Pharmacie, Paris.

L'enseignement de la pharmacie s'organise avec des cours de pharmacie qui sont créés en province et à Paris au jardin du Roi ainsi qu'au jardin des apothicaires, rue de l'Arbalète. Après un long stage, les élèves passent, devant des médecins et maîtres-apothicaires, des examens au cours desquels ils doivent faire des reconnaissances des plantes et indiquer leur action thérapeutique. Malgré l'opposition de la Faculté de médecine, Louis XVI donne le droit d'enseigner aux pharmaciens et décide de la réunion des apothicaires privilégiés et des maîres-apothicaires sous le nom de "Collège de Pharmacie". Ce dernier, installé dans l'établissement de la rue de l'Arbalète, supprimé un moment par la Révolution, sera rétabli dès 1791. Sous le Consulat, Bonaparte, par la loi du 21 Germinal An XI, réorganise la pharmacie française, crée des écoles de Pharmacie, réglemente la fabrication des médicaments, la vente des toxiques et l'inspection des officines.

Rédaction: J.C.D.
Iconographie: J.L.D
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